L’eau, c’est la vie, mais que faire quand il y en a de moins en moins ? La vie s’arrêtera-t-elle aussi ? C’est la raison pour laquelle Solidagro insiste de plus en plus sur la protection des sources d’eau et des zones d’infiltration !
« L’eau, c’est la vie », ces mots, on les entend souvent dans la région du Cono Sur en Bolivie. Et inversement, on dit que sans eau, il n’y a pas de vie. Voilà qui est de plus en plus la réalité pour de nombreu.ses.x paysan.ne.s à Cochabamba, où Solidagro et ses partenaires Agrecol, Aynisuyu et INCCA (Instituto de Capacitación Campesina) sont actifs. La migration forcée vers la ville suite à la pénurie d’eau est ici d’actualité.
« Avant, il y avait ici une source », voilà ce que Solidagro entend de plus en plus souvent lors de visites dans des villages agricoles.
Une matière à réflexion pour Solidagro et ses partenaires, après plus de 10 ans de mise sur pied de projets ruraux autour de la sécurité alimentaire. L’irrigation a toujours été au centre de ces projets, avec succès. De nombreu.ses.x paysan.ne.s ont pu doubler leurs récoltes grâce à l’accès à de l’eau d’irrigation. Mais pour combien de temps encore ?
Entretemps, et depuis 2018, Solidagro travaille avec ses partenaires dans la région du Cono Sur, composée de 12 communes rurales, avec le développement participatif de la législation communale pour la protection des sources d’eau et des zones d’irrigation. Ce processus commence à porter ses fruits. En septembre 2019, la commune de Vila Vila a approuvé sa loi et les travaux sont en cours dans d’autres communes de la région de Cono Sur. A Pasorapa, Solidagro a assisté à un premier sommet de l’eau, avec une très forte représentation des organisations de base et des autorités communales, et qui a jeté les bases pour une nouvelle législation pour une politique de l’eau intégrale.
Au total, outre Vila Vila, 8 communes boliviennes ont une législation pour la protection de leurs sources d’eau et zones d’infiltration. Les communes qui s’y investissent comptent donc parmi les pionnières (source : Normativa municipal de protección de zonas de recarga hídrica, Helvetas/ MMAyA, novembre 2018).
Zones d’infiltration ?
La protection des sources d’eau et des zones d’infiltration est rarement présentée comme une priorité des organisations de base ou des autorités communales. L’accès à l’eau est très mobilisateur pour les act.rice.eur.s loca.les.ux mais on n’a pas encore suffisamment conscience de l’importance de la protection de l’eau en altitude. Convaincre ces act.rice.eur.s loca.les.ux d’agir afin de garantir leur eau pour l’avenir est donc un défi. L’eau de la saison des pluies vient s’ajouter aux eaux souterraines, ce qui fait qu’il y a toujours de l’eau dans les sources, même pendant la saison sèche.
Le niveau d’infiltration dépend de divers facteurs, comme le degré de la pente, la nature du sol, la végétation, les précipitations dans une région donnée… Si les villageois de ces régions abattent les arbres de façon incontrôlée, brûlent la végétation et étendent les zones de pâturage, les zones d’infiltration ne peuvent plus assurer leur rôle d’éponge et l’eau dévale de la montagne, souvent en provoquant de l’érosion. Les pesticides chimiques utilisés et les déjections du bétail polluent les sources d’eau. Protéger ces zones est donc d’une importance capitale !
Pour en persuader les communes et les organisations de base, le programme de Solidagro a organisé notamment des échanges avec d’autres communes, plus avancées par rapport à la protection de leur eau. Solidagro a fait une large promotion de la législation autour de la protection des sources d’eau en la présentant comme un exemple, dans la région du Cono Sur et ailleurs.
Le renforcement des capacités quant aux aspects de fond et légaux, la sensibilisation via des folders et les radios régionales, le lobbying vers les communes, la participation à des réunions de paysans et des organisations paysannes, voilà des éléments du développement commun de la législation locale. Pour ce faire, les partenaires mettent en commun les capacités locales avec celles d’autres ONG, d’universités, et pour des questions légales spécifiques, les partenaires de Solidagro engagent des consultants.
Législation et effets
Concrètement, la législation prévoit un sommet sur l’eau annuel avec tou.te.s les act.rice.eur.s loca.les.ux impliqué.e.s et une participation égale des hommes et des femmes. Un tel sommet est l’occasion de déterminer les priorités, identifier les zones d’infiltration à protéger en priorité et établir ensuite un plan pour la protection de ces zones. Il s’agit notamment de clôturer les sources et les zones d’infiltration, de planter des espèces d’arbres indigènes, de creuser des tranchées de filtration…
La loi fixe un pourcentage de 0,5% du budget communal total qui doit être consacré à la mise en œuvre de ce plan. Une organisation d’act.rice.eur.s loca.les.ux est également mise sur pied pour la gestion des micro bassins hydrographiques. Le non-respect des règles dans les zones protégées est punissable.
Développer une législation locale n’a pas beaucoup de sens si les act.rice.eur.s loca.les.ux, les paysan.ne.s et les organisations paysannes, les ouvri.ère.er.s de l’irrigation, ne sont pas impliqués dès le départ dans ce processus. Les organisations de base doivent exercer un contrôle social de sorte que la commune mette réellement les choses en pratique. Ce n’est que si la proposition est suffisamment légitime et portée par les organisations de base que les communes continueront à mettre la législation en œuvre.
L’approche de Solidagro suscite dès à présent l’intérêt de nombreuses autres organisations, dont des ONG, des réseaux, des universités et d’autres communes. Le Ministère de l’Eau et de l’Environnement soutient de telles législations locales en ligne avec le Plan National pour les bassins hydrographiques. En mettant toutes les forces en commun, le programme de Solidagro pour la Bolivie espère un effet boule de neige, afin que les communes en Bolivie soient de plus en plus nombreuses à protéger leur eau.